Architecture et formation
Ce secteur des Alpes Savoyardes se caractérise par la présence de deux lentilles de roches plutoniques et métamorphiques, parallèles, d'orientation Sud-Ouest / Nord-Est, séparées par une vallée "profonde", composée de roches sédimentaires plissées, basculées subverticalement et érodées (vallée de Chamonix).
Schéma structural 3D des massifs du Mont-Blanc et des Aiguilles-Rouges (M.N.T. personnel)
Le massif du Mont-Blanc se compose de deux grandes unités pétrologiques : des roches plutoniques (le granite du Mont-Blanc) et des roches métamorphiques (gneiss principalement). Le sommet du mont Blanc se situe d'ailleurs au contact de ces deux unités. Le granite passe d'une position intrusive dans les gneiss au Sud-Ouest à un contact tectonique au Nord-Est (versant Nord), par le biais de la faille de l'Angle.
On peut y associer également les sédiments triasiques et jurassiques de la suture de Chamonix (gypse, cargneules et "calcschistes") et du versant Sud, des roches volcaniques (rhyolites) sur le versant Sud du val Ferret Suisse, et au Sud-Ouest, un sillon de roches carbonifères.
Le massif des Aiguilles-Rouges est de même composition, mais en proportions différentes. Ce sont les roches métamorphiques qui affleurent en majorité (gneiss, micaschistes, amphibolite...). Deux petits affleurements de granite sont présents, au Nord-Est et à l'Ouest, respectivement au droit de Vallorcine et des Houches. Les dépôts sédimentaires du Carbonifère constituent toute sa partie Ouest (Tête-Noire, Montvauthier, Pormenaz...), et affleurent également aux Posettes, au Nord-Est. Quelques roches sédimentaires sont visibles, çà et là : au sommet du Belvédère (Trias), au pied de Tête-Noire (côté du Fayet, Trias et Jurassique) et bien évidemment entre le Buet et Émosson (Trias) où se trouve l'une des plus belles dalles d'empreintes de dinosaures d'Europe.
Schéma structural plan des massifs du Mont-Blanc et des Aiguilles-Rouges
Coupe géologique simplifiée Nord-Ouest/Sud-Est au travers des deux massifs (topographie issue d'un MNT)
Les plus anciens indices morphologiques dateraient de l'Ordovicien (~450 MA - von Raumer et Bussy) avec la formation de roches sédimentaires marines sur plateau continental. Ces sédiments ont été transformés par métamorphisme lors de la création de la chaine varique (~380 MA) formant aujourd'hui le socle métamorphique des massifs des Aiguilles-Rouges et du Mt-Blanc (gneiss, marbre, ...). Ces montagnes sont reprises en partie par l'érosion.
Au Viséen (~340 MA - Carbonifère supérieur), la région est très volcanique, avec dépôts de grandes quantités de cendres formant aujourd'hui les schistes verts observables aux Houches, après enfouissement sous une nouvelle chaine de montagne, qui sera également érodée en partie.
Au Westphalien supérieur (305 MA - Carbonifère moyen), le relief correspond à une pénéplaine, issue de l'érosion des montagnes variques, couverte de forêts tropicales et de marécages, avec pour tout relief quelques horsts et grabens. Des rivières et des torrents déposent des alluvions qui se transformeront en poudingues, comme ceux de Pormenaz. Les marais et les lacs piègent des fragments de végétaux (troncs et feuilles) que l'on peut actuellement retrouver sous forme d'empreintes dans les schistes ardoisiers. L'érosion effectue encore une fois son travail.
Au tout début du Trias (~245 MA), des torrents déposent quelques grès et conglomérats sur le substratum affleurant (granite, gneiss). Par la suite, une mer peu profonde envahit la plate-forme continentale. Quelques étendues de terre subsistent quand même. C'est à cette époque que les grès à empreintes de dinosaures se forment au niveau du futur Émosson, sur un littoral constitué de plages sableuses. Dans de grandes lagunes, du gypse et du sel se déposent par précipitation. Des tensions dans la croûte font apparaître quelques fissures et fossés d'effondrement.
Au Jurassique supérieur, la mer recouvre toutes les terres. L'océan alpin est en train de naître plus au Sud-Est, avec la création d'une croûte océanique. Le système de horsts et de grabben permet ou non la sédimentation.
Au Crétacé, après s'être séparés, les continents se rapprochent. La croûte océanique subducte sous la plaque apulienne (plaque satellite de l'Afrique). Le massif du Mont-Blanc est toujours immergé.
Les deux plaques sont entrées en collision, provoquant la surrection des Alpes. Les roches sédimentaires se plissent et se déplacent vers le Nord sous forme de nappes de charriage. Les altitudes augmentent. A cause de la flexion de la croûte continentale, des bassins se forment sur la périphérie des Alpes. Ce sont les bassins molassiques, d'abord lacustres puis marins (bras de mer internes), où nagent de nombreux requins (dents fossilisées que l'on peut retrouver actuellement). Les sédiments détritiques issus de l'érosion des massifs en surrection forment les grès molassiques. L'ancienne croûte océanique se retrouve coincée entre les deux plaques continentales.
La collision se poursuit formant les Alpes comme on peut les trouver actuellement, et Mont-Blanc atteint enfin son altitude actuelle (4810 ± 2 m).
Schémas (sauf Carbonifère) inspirés de "De Genève au Mont-Blanc" par Danielle DECROUEZ, Museum d'histoire naturelle de Genève, avec son aimable autorisation.
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